30 décembre 2006

Mon blogoversaire

Voilà! Déjà un an que j'ai débarqué sur la blogosphère.
Le but de ce blog était de décrire l'humain dans ses absurdités: rire des autres et rire de moi-même. Tout est dans la critique, la dérision, le cynisme et surtout l'exagération.
Je continuerai je l'espère dans cette voie, si la vie m'en laisse le temps.

Merci à tous mes lecteurs pour leurs commentaires, merci à tous les anonymes pour leur passage.
J'attends vos remarques, vos suggestions et vos critiques.
Et pourquoi pas aussi, me dire quel est votre post préferé de moi et celui que vous détestez le plus!!

Joyeux anniversaire à mon bloguinou chéri et encore merci à tous!

16 décembre 2006

Pélerinage à Paris

Madame Naziha avait passé ses innombrables nuits d’insomnie à imaginer la maîtresse de son mari : une pin-up extravertie à la beauté insultante et au charme ravageur ? Une de ces femmes inaccessibles que les frustrés collent en poster dans les murs de leurs chambres ? Une de ces beautés typées sur lesquelles tant d’hommes fantasment en libérant leur semence infertile ?
Zohra, la voyante, l’avait un peu rassurée en lui rappelant que Si Lamine, son mari, pourrait être un probable fils caché de Fernandel et d’Alice Sapritch et que cette femme qui semblait lui tourner autour, était, à l’évidence, plus proche de la caricature que du portrait.

Elle était sortie du cabinet de Zohra plus déterminée que jamais. Car Madame Naziha était une battante, elle avait, malgré sa corpulence de cachalot, gravi toutes les marches de l’échelle sociale. Du haut de cette échelle, sa situation passée lui donnait des vertiges. Elle ne pouvait résolument pas retourner à son ancienne condition. Le souvenir pesant de ses cours de maths avec la voix lugubre de Monsieur Laamouri débitant des théorèmes de Grecs aux noms si compliqués à retenir la motivait encore plus qu’un Roger Lemaire. Son « Pythagore » gore gore gore résonnait dans sa boîte crânienne évidée. Même les échos la narguaient en lui rappelant le tragique de sa situation.
Malgré son asthénie nerveuse, elle avait fini par se rendre à l’évidence : sans Si Lamine elle n’était plus rien. Il l’avait peut-être trompée oui, et alors ?! N’était-ce pas en fin de compte un passage obligé pour toute femme? Et puis, c’était rassurant pour elle de se dire que même Hillary Clinton avait vécu cette expérience et le couple ne s’en portait que mieux depuis. Qui sait, sa Lewinsky à elle s’était peut-être aussi contentée de quelques douceurs sous le bureau. Il n’y avait vraiment pas de quoi en faire une choucroute !

Maintenant, elle ne demandait qu’à oublier ce triste passé.

La distribution naturelle des caractères génétiques fait qu’il existe pour les deux sexes un raccourci dans les processus de guérison du mal-être. Comme dans les jeux vidéo, où une astuce du type « CTRL+ALT+F4 » peut vous envoyer directement au niveau 3 du jeu sans affronter le monstre à huit têtes et la pieuvre aux mille tentacules, Dieu, dans son infinie miséricorde, a mis en place un raccourci dans le long chemin de l’oubli.
Chez le mâle, les choses sont simples, voire primitives. Un homme peut tirer un trait sur ses problèmes les plus angoissants avec une simple partie de jambes en l’air. Tout homme vous le dira, le sexe c’est salutaire.
Chez la femme, ce raccourci existe aussi, quoi que, vous en conviendrez, une femme nécessite un peu plus de moyens. Toute femme dont l’avenir peut sembler incertain à T-1 peut, si vous lui mettez une carte de crédit entre les mains à l’instant T, voir son futur devenir aussi rose qu’une layette de bébé. C’est connu, seul le shopping peut remettre une femme d’appoint et encore plus quand il s’agit d’une Naziha qui commence à se lasser de ses dix fourrures.

Voilà donc notre chère Madame Naziha embarquant sur le vol TU 714 à destination de Paris-Orly pour un séjour des plus prometteurs. Bien entendu, nous ne reviendrons pas sur les conditions dans lesquelles elle a obtenu le visa tant convoité pour la France. Faire la queue au consulat, donner des papiers justificatifs, attendre au milieu de la populasse, ce n’est pas pour elle. Payer quelqu’un pour lui ramener son passeport orné d’un Visa d’un an, ça c’est elle.
Une Naziha ne paye jamais un billet en première classe, mais bizarrement on retrouve toujours les Naziha en 1ère classe. Car une Naziha connaît toujours quelqu’un qui connaît quelqu’un qui connaît quelqu’un qui connaît le pilote, le Steward ou l’hôtesse et qui viendra indiscrètement la déplacer sous le regard frustré de la classe économique. De toute façon, en 1ère classe ou ailleurs, la nourriture sera toujours aussi infecte. Mais entre un saumon insipide et un poulet au goût de vomi, le saumon passera toujours mieux.
Qu’on se rassure, Madame Naziha fera très bon voyage. Mais une Naziha ne vous dira jamais qu’elle a fait « bon voyage ». Elle se plaindra toujours du type à coté d’elle, de l’hôtesse impolie ou des perturbations atmosphériques.

En foulant le territoire français, Madame Naziha change inéluctablement de statut. Elle n’est plus qu’une simple citoyenne tunisienne, contrainte de subir les contrôles douaniers et policiers. Adieu les ordres, les privilèges, le luxe, les voitures avec chauffeur, le personnel, les dîners dans les restaurants les plus chics, le soleil, les résidences secondaires. Bonjour le métro, la misère, les SDF, l’exiguïté, le froid que même la fourrure d’un troupeau de renards ne peut masquer.
C’est dans ces moments là que Madame Naziha prenait conscience de son influence dans son pays. A Tunis, elle pouvait tout acheter avec son argent, même les administrations. Ici, elle n’était qu’une vulgaire consommatrice dont le pouvoir d’achat avait diminué de moitié.

A peine arrivée, et dans une aliénation quasi bestiale, elle dévalise C&A et H&M. Pour ses amies, elle dira que c’est du D&G, à quelques lettres près.
Elle traque désespérément la moindre ristourne : -30% chez TATI, elle entre tout de suite. Les chaussettes et les culottes de grand-mère passent avec elle en caisse. C’est pas avec ça qu’elle reconquérra Si Lamine, mais ce qui n’est pas cher vaut forcément le coup.
Sa fièvre acheteuse pouvait exploser un thermomètre.
Elle se permettait tout ce que son rang lui interdisait de faire à Tunis car ici, personne ne la connaissait.
Dans les rues de Strasbourg St Denis, parmi les putains siliconées, maquillées comme des voitures volées et se tortillant dans le froid sibérien, elle entre dans chaque magasin, achète les faux bijoux, les sacs et les foulards de ces chinois qu’elle méprise. Dans la rue, elle évite le regard des noirs et autres minorités hostiles.

Madame Naziha achète, donc Madame Naziha vit.
Dans un victorieux « Veni Vidi Vici », elle se sentait renaître.


En attendant le métro, elle jette un œil sur les affiches : « Venise et l’Orient » à l’Institut du Monde Arabe, Exposition sur les peintres impressionnistes dans une galerie d’Art. Mais il y a mieux à faire à Paris. Le cinéma, le théâtre, l’opéra, les spectacles, les expositions, Madame Naziha vivait dans un monde parallèle à tout cela. Le tourisme culturel, elle n’en soupçonnait même pas l’existence.

Au retour, ses excédents de bagages la font même sourire, ils représentent la valeur ajoutée de son pèlerinage dans la capitale mondiale du textile. Elle est fière de tout ce tas de vêtements qui lui permettra de se redorer le blason. Madame Naziha était devenue une association à but non lucratif : elle avait dépensé les dons de son mari pour son émancipation sociale.

Avant de monter dans l’avion, Madame Naziha fait un passage obligé par le Free shop pour les chocolats, habitude tunisienne ringarde et obsolète, quelques bouteilles d’alcool pour les apéro’, des cigares et des cigarettes pour les amis.
Dans sa précipitation, notre Madame Naziha va évidemment oublier son sac à main et créer une alerte au bagage abandonné sans se soucier de rien. Malgré plusieurs appels dans tout l’aéroport, c’est en cherchant son briquet qu’elle s’apercevra de la perte de son sac et se précipitera hors de l’avion pour le récupérer.

Tant que des Naziha prendront l’avion, Tunisair affichera des retards.

Arrivée chez elle, Madame Naziha reprend sa place sur le trône. Paris c’est bien, mais juste pour frimer à Tunis.

14 décembre 2006

Coming Soon: Mme Naziha, le retour

Précédemment dans "Mme Naziha, chronique d'une vie de bourgeoise tunisienne".

Mme Naziha, bourgeoise tunisienne a épousé Si Lamine, riche homme d'affaires.
Lasse de sa vie de potiche, elle s'est passionnée pour l'Art.
Malheureusement, son bonheur se conjugua au passé lorsqu'elle commença à soupçonner l'infidélité de son mari.
Il ya plusieurs semaines, elle finit par se convaincre d'aller consulter Zohra, une voyante aux dons extraordinaires.

Nous l'avions laissée terrorisée, et abattue.

Que s'est-il passé depuis?